
Prix plancher, prix plafond : comment fixer des limites tarifaires solides pour piloter vos revenus
Beaucoup d’hôteliers ajustent leurs prix au jour le jour, souvent en suivant la concurrence ou en réagissant sous pression. Mais sans repères clairs, ces ajustements peuvent vite dériver.
Vendre trop bas, c’est rogner sa marge ou abîmer son image.
Vendre trop haut, c’est freiner la conversion, créer des attentes irréalistes ou perdre en crédibilité.
Pour piloter efficacement ses tarifs, il ne suffit pas d’avoir une grille bien construite. Il faut aussi en connaître les limites. C’est tout l’enjeu du prix plancher et du prix plafond.
Le prix plancher, c’est le seuil en dessous duquel une vente devient non rentable, voire contre-productive.
Le prix plafond, c’est la limite haute à ne pas dépasser pour rester aligné avec la valeur perçue de votre offre.
Ces deux repères ne sont pas des règles figées, mais des balises indispensables pour sécuriser vos décisions tarifaires et garder la main, même dans les périodes de tension.
Le prix plancher : votre seuil d’alerte
Le prix plancher correspond au tarif minimum en dessous duquel une vente devient problématique, soit d’un point de vue financier, soit en termes d’image. Il existe deux façons de l’envisager.
Prix plancher à court terme
Il s’appuie uniquement sur les coûts variables liés à la vente d’une chambre. C’est utile pour savoir jusqu’à quel niveau on peut descendre ponctuellement, sans vendre à perte.
À inclure dans le calcul :
- ménage et blanchisserie
- consommables et produits d’accueil
- petit-déjeuner (si inclus)
- commissions OTA (si applicable)
- linge, eau, électricité
À cela, on ajoute une marge minimale souhaitée, même symbolique.
Exemple de calcul :
- Blanchisserie : 6 €
- Ménage : 10 €
- Petit-déjeuner : 8 €
- Produits d’accueil : 2 €
- Commission OTA (15 % sur 120 €) : 18 €
Total des coûts variables : 44 € - Marge minimale souhaitée : 20 €
→ Prix plancher court terme = 64 €
Ce tarif peut être utilisé dans des contextes spécifiques : remplissage en basse saison, offre ciblée, vente de dernière minute. Mais il doit rester exceptionnel.
Prix plancher à long terme
Ce calcul intègre l’ensemble des charges fixes de l’établissement, réparties uniquement sur les chambres effectivement vendues. Il permet de définir un prix plancher cohérent avec votre seuil de rentabilité réel, par chambre occupée.
Méthode :
- Calculez vos charges fixes annuelles (salaires, loyer, abonnements, assurances, maintenance, taxes…).
- Estimez un volume de chambres vendues sur l’année, en fonction de votre taux d’occupation cible ou habituel (ex. : 50 chambres × 365 jours × 74 % = 13 505 chambres vendues).
- Divisez vos charges fixes par ce volume pour obtenir le coût fixe par chambre occupée.
- Ajoutez-y vos coûts variables par chambre.
Exemple simplifié :
- Charges fixes annuelles = 912 500 €
- Chambres vendues sur l’année = 13 500
- Coût fixe par chambre occupée = 912 500 ÷ 13 500 = 67,59 €
- Coût variable = 44 €
→ Prix plancher long terme = 67,59 € + 44 € = 111,59 €
Ce prix plancher long terme représente le niveau de rentabilité minimum par chambre vendue. En dessous de ce seuil, chaque vente génère une perte.
Plus votre taux d’occupation est élevé, plus ce coût fixe par chambre baisse, et plus vous avez de marge de manœuvre tarifaire.
Le prix plafond : votre garde-fou marketing
À l’autre extrémité de l’échelle, le prix plafond n’a pas vocation à figer vos ambitions. Il sert à garantir que votre tarif reste cohérent avec ce que vous proposez.
Un prix trop élevé, même en très forte demande, peut nuire à votre image ou générer une insatisfaction client si la promesse perçue ne suit pas. Il peut aussi rendre la conversion plus difficile, notamment en vente directe.
Comment le définir concrètement ?
Il ne s’agit pas de choisir un chiffre au hasard. Le plafond se construit sur trois dimensions.
1. Le positionnement de l’hôtel
Un 3 étoiles en périphérie ne peut pas afficher 500 € la nuit, même si tout est complet autour. À l’inverse, un 4 étoiles en plein centre de Paris avec une excellente e-réputation peut viser 700 € ou plus.
2. Les prix de la concurrence
Surveillez vos concurrents directs pendant les pics de demande. Si les hôtels comparables à vous plafonnent à 400 €, vous pouvez viser 450 ou 500 € si votre produit est mieux valorisé. Mais pas 700 € sans justification.
3. Le comportement de vos clients
Votre historique de conversion est une source précieuse : à partir de quel tarif le taux de réservation chute-t-il ? Quelles sont les plages tarifaires qui convertissent le mieux ? Ces données doivent vous aider à identifier un seuil critique.
Exemples concrets
Cas 1 : un 3 étoiles rénové, 20 chambres, dans une rue calme à 10 min du centre
- Tarif habituel : 110 à 150 €
- Prix plafond réaliste : 180 à 200 €, au-delà la conversion ralentit fortement
Cas 2 : un 4 étoiles bien noté dans le centre de Paris avec vue partielle sur un monument
- Tarif habituel : 250 à 400 €
- Prix plafond réaliste : jusqu’à 600 € en période de très forte demande, mais pas plus sans offre ou expérience spéciale
4. Le comportement de vos équipes
Un prix trop élevé sur le papier peut rester théorique, s’il n’est pas assumé sur le terrain. Si vos équipes sont mal à l’aise à l’idée d’annoncer ou de justifier certains tarifs, c’est un signal à ne pas négliger. Prenez le temps d’identifier l’origine de cette gêne.
Est-ce un biais psychologique lié à une habitude tarifaire ? Un manque de formation pour valoriser le prix ? Ou bien un retour régulier de clients qui jugent l’écart entre prix et expérience difficile à justifier ?
Dans tous les cas, ces retours vous offrent un indicateur précieux : un prix plafond ne doit pas seulement être économiquement justifié, il doit aussi pouvoir être défendu avec conviction. Sinon, il devient contre-productif.
À partir de combien de chambres vendues mon établissement devient-il rentable ?
Calculer précisément son seuil de rentabilité est essentiel pour piloter efficacement votre hôtel.
La méthode est simple et concrète :
Seuil de rentabilité = Coûts fixes ÷ Marge sur coût variable
Illustration avec un exemple chiffré :
- Coûts fixes annuels : 500 000 €
- Prix moyen par chambre (ADR) : 100 €
- Coût variable moyen par chambre vendue : 30 €
- Marge sur coût variable : 100 € – 30 € = 70 €
Résultats concrets :
Pour atteindre l’équilibre financier, l’hôtel doit vendre :
500 000 € ÷ 70 € ≈ 7 143 nuitées par an
Si votre hôtel compte 50 chambres, cela représente :
- 7 143 nuitées ÷ (50 chambres × 365 jours) ≈ 39 % de taux d’occupation annuel
Conclusion : à partir de 39 % d’occupation, chaque nuitée supplémentaire contribue directement à vos bénéfices. Un indicateur stratégique essentiel pour maîtriser votre rentabilité et vos tarifs.
Pour comprendre en détail comment distinguer coûts fixes et coûts variables, et pourquoi les chambres vendues après ce seuil sont les plus rentables :
→ [Découvrez notre article sur les coûts fixes et les coûts variables]
Intégrer ces repères dans votre stratégie tarifaire
Ces bornes tarifaires sont là pour cadrer vos décisions, pas les brider. Une fois posées, elles peuvent être utilisées pour :
- Construire des grilles tarifaires lisibles et adaptables
- Paramétrer vos PMS, RMS ou channel managers
- Encadrer les ventes OTA et éviter les dérapages tarifaires
Elles doivent être réévaluées régulièrement :
- Si vos charges évoluent
- Si vous changez de positionnement
- Ou simplement à chaque audit stratégique
Conclusion
Fixer ses prix, ce n’est pas juste répondre à la demande. C’est aussi savoir où se situe la limite.
- Le prix plancher vous protège des ventes non rentables.
- Le prix plafond vous évite les excès contre-productifs.
- Et le seuil de rentabilité vous donne une boussole pour piloter votre activité avec lucidité.
Posez vos repères, et ensuite, seulement, ajustez vos prix.
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